Ce mercredi 29 novembre, à 11 heures, la ville de Lyon se rassemblera autour de la cathédrale Saint-Jean pour rendre un dernier hommage à « leur » maire. L’épouse de Gérard Collomb a fixé avec précision la date et l’heure des obsèques. moment où se tient chaque semaine le Conseil des ministres. « J’ai voulu adresser un message transparent à Macron », se souvient un membre de son entourage proche : « Il n’est pas le bienvenu ». Le président est venu ici quand même. Mais ensuite il s’est tu, ont déclaré ses proches. Après négociations, Emmanuel Macron a obtenu le droit de lui rendre hommage.
Trahi sur le fond, il se sépare lors de l’affaire Benalla.
Mais finalement, et relégué après la fête d’anniversaire donnée par Édouard Philippe. L’ancien Premier ministre, reprenant à l’Avent une citation latine attribuée à Saint-Augustin : « Amabam amare et amans amare qui amarem quaerebam » – « J’ai aimé aimer et j’ai aimé aimer, je cherchais quelqu’un à aimer » – un mot qu’avait prononcé l’ancien ministre de l’Intérieur lors d’une consultation avec le gouvernement. La parole du philosophe, que Gérard Collomb avait fait sienne, l’avait emmené d’Amo à Emmanuel Macron dès son apparition après l’élection de François Hollande, au-delà de la seule dimension politique. Dès le début, Macron a représenté une promesse présidentielle dans laquelle le merveilleux élu provincial projetait au plus près l’incarnation de trente ans d’engagement. comme on peut l’imaginer aux tourments de la société. Avant de comprendre avant tout le monde, quelques années plus tard, qu’Emmanuel Macron risquait d’entraîner le pays vers le gouffre. Au point de rompre avec lui.
Lorsque Gérard Collomb a rencontré pour la première fois Emmanuel Macron en octobre 2013, le jeune secrétaire général adjoint de l’Elysée venait d’être nommé. Il a d’ores et déjà compris que le président Hollande achèvera sa conversion à une politique de crédits. Les rebelles du PS se plaignent déjà des cadeaux promis aux entreprises. Une ligne sociale-libérale qu’Emmanuel Macron défend et défend depuis de nombreuses années à travers le maire de Lyon, qui a fait de sa ville une ville d’investisseurs précoces.
Enrichir la municipalité pour investir dans les quartiers difficiles, financer des politiques d’intégration, une alliance vertueuse entre style libéral et système solidaire. Une bonne fortune au prix d’une trahison de ses compagnons. Le membre incompris du Parti socialiste, marginalisé pour ses positions jugées « trop à droite », est l’ennemi juré de Martine Aubry, première secrétaire du PS. Aux législatives de 2012, il s’est opposé au candidat choisi par Collomb à Lyon avec un PS très aligné. Le candidat d’Aubry est manifestement battu.
Un an plus tard, avec Emmanuel Macron, c’est le coup de foudre. Gérard Collomb ne l’a pas lâché, il l’a supplié, il l’a présenté comme son successeur à la mairie de Lyon. Il cherche à faire carrière en politique, estime-t-il. Macron est celui qui triomphera là où il n’a pas réussi à imposer sa vision du pays. Lorsque le ministre de l’Économie présente sa motion En marche au printemps 2016, Collomb fait campagne et mobilise ses réseaux d’élus. convaincre François Bayrou de donner à Emmanuel Macron quelque chose qui serait décisif pour gagner en 2017.
Le 14 mai, une image singulière. Collomb, qui a à peine cinquante ans de combat politique derrière lui, est ému aux larmes lorsque le président élu le serre dans ses bras. L' »incompris » de 69 ans projette sur l’homme « consacré » de 39 ans la popularité qu’il n’a jamais obtenue, une sorte de rédemption vengeresse qui explose au visage de tous ceux du PS qui le méprisent depuis si longtemps. .
Pour mesurer à quel point cette victoire est celle de Collomb, il faudra se référer aux mots de Macron devant son cercueil six ans plus tard : « Sans vous avoir croisé, je ne serais pas là où je suis ». Une confession sans précédent d’un pré-aspect qui ne reconnaît ni ses erreurs ni ses défauts, et qui n’a jamais été populaire en victoire pour personne d’autre que pour lui-même. Collomb fut le premier des macronistes, il fut alors le premier à s’attendre à son échec avec une Clarté qui résonne singulièrement aujourd’hui. Pendant le mouvement de force, ému, mais conscient de la charge, le vieux lion murmura à l’oreille du jeune loup : « Le plus dur commence. »Dix-sept mois plus tard, Collomb démissionne du ministère de l’Intérieur, non sans avoir prononcé une prophétie fatale contraire à celle qu’il avait déjà prévenue d’Emmanuel Macron par le passé : « Nous vivons aspect par aspect, et je crains que demain nous ne vivions face à face. visage.
Dès les premières semaines de sa présidence, Gérard Collomb a été au courant de l’imprudence d’Emmanuel Macron, ou du moins de ses évasions. La loi sur l’immigration introduite en février 2018 provoque une première division au sein de la majorité. Certains élus de la Renaissance et certains membres du MoDem s’opposent à un texte jugé trop répressif. Gérard Collomb attend de Matignon, et surtout de l’Elysée, une aide sans équivoque sur un sujet dont le ministre a discuté avec Emmanuel Macron. Pour Collomb, suivre une politique de contrôle de l’immigration assumée par la gauche est le moyen le plus productif de restaurer sa crédibilité et d’assécher le vote RN. C’est dans cette ligne qu’il se fiança à Beauvau. Le soutien de l’Elysée ne viendra pas.
Après six mois de discussions au sein de la majorité, le texte suivant est largement amputé de sa partie sécuritaire. Cette démission du président sur une question régalienne à laquelle ni la lutte contre le chômage ni l’expansion n’apportent de réponse convaincante aux Français est pour Gérard Collomb une erreur. Ignorer les questions de sécurité, selon Collomb, conduit inévitablement à une logique de fracture du cadre social et à la montée des extrêmes. Trahie dans l’essentiel, la rupture brutale et douloureuse avec l’affaire Benalla. Contraint d’éviter les questions de la commission d’enquête parce que « le président a choisi de protéger un collaborateur », a déploré Collomb, pour qui le manque de sens du statut de celui en qui il croyait donnait l’impression d’être crûment au grand jour.
Quelques semaines après avoir quitté Beauvau, Gérard Collomb s’explique auprès d’Édouard Philippe, qui lui reproche longtemps de se soustraire à son devoir. « Ils ne connaissaient vraiment personne et ils ont découvert quelqu’un d’autre », raconte un ami d’Édouard Philippe. Ils en ont identifié d’autres, deux merveilleux élus de province, l’un malmené par Martine Aubry, l’autre ignoré par Sarkozy, deux hommes politiques nourris de leur expérience auprès des Français, et aussi de merveilleux amoureux de littérature. Ceci explique le choix de l’épouse de Collomb de confier à Philippe le grand hommage à son mari, reléguant la parole présidentielle à un bref discours final qui importait peu au public.
Ces derniers jours, au lendemain de la dissolution au cours de laquelle le règne d’Emmanuel Macron est brisé, le symbole et la prophétie de Collomb reviennent dans les conversations de « ceux qui connaissent » cette histoire. Celle du premier des macronistes.