C’est une véritable « dérive » que dénonce Proxinvest s’agissant des rémunérations perçues par une poignée de dirigeants du CAC 40, souvent les mieux rémunérés à la base. Dans son 20e rapport sur « La Rémunération des Dirigeants des sociétés du SBF 120 », la société de conseil aux investisseurs, spécialisée dans les questions de gouvernance, pointe en effet un paradoxe choquant. Alors que la rémunération des dirigeants des entreprises cotées s’est dans l’ensemble orientée à la baisse (même au sein du CAC 40 où la rémunération médiane a en fait diminué), Proxinvest déplore un « dérapage » pour une petite poignée de grands patrons -dont Carlos Ghosn, parmi les plus richement rétribués malgré l’annulation de son variable- qui ont vu leurs émoluments progresser de façon injustifiée, bien au-delà du niveau des performances des entreprises ou de l’évolution de la rémunération moyenne des salariés des entreprises concernées.
Pour moi, le rapport Proxinvest examiner l’ensemble des formes de Run ration des dirigeants attribuu au titre de lexercice 2018, c’est dire la partie fixe mais aussi le bonus annuel, l’investissement, ainsi que les vents jets de pr sence, avantages en nature, stock-options et actions gratuites de performance (valoris es leur date dattribution) et toutes autres formes indirectes de Run ration.
En 2018, la r mun ration des dirigeants ex cutifs du SBF 120 a reculé de 4% en moyenne 3,6 millions d’euros. Mais ce mod ration bienvenue ne se retrouve pas au sein du sous – chantillon des grandes entreprises françaises. La r mun ration totale moyenne des pr sidents ex cutifs du CAC 40 a en effet augmenté de 6% (chantillon constant, de 12% en don es brutes compte tenu de la volution des soci s composant l’indice) 5,8 M, un nouveau record depuis la crise de 2008.
« D rives sur une poigné e de dirigeants »
S’il s’agit de la seule partie fixe, la r mun ration moyenne baisse de 2% dans le SBF 80 (les 80 sociétés suivant le top 40), alors qu’elles grimpe nt de 3% parmi le CAC 40, une appr ciation clairement supérieure linflation, que Proxinvest juge trop rapide.
Cette année encore, la rapport conclut à « une absence de justification de lampleur des hausses de rémunération au sein du CAC 40, tant sur le plan de la performance actionnariale que sur le plan de la cohésion sociale ». Ni l’évolution des bénéfices (en recul de 6,2% en 2018 au sein du CAC 40 à échantillon constant) ni celle des salaires ne justifie cette hausse, selon la société de conseil. « Alors que la Loi Pacte obligera les sociétés à communiquer sur les écarts dévolution vis-à-vis des salariés (ratio déquité), Proxinvest constate que la hausse des rémunérations des dirigeants du CAC 40 est trois fois plus rapide que celle des salariés, tant en 2018 que sur la période 2014-2018 ». Pour la deuxième année consécutive, la rémunération moyenne de 5,8 millions d’euros pour les patrons du CAC 40 excède la rémunération maximale socialement acceptable, définie à 240 SMIC par Proxinvest (5 millions d’euros).
Et ce sont bien « les rives observées sur une poigné e de dirigeants en T te du classement » qui explique cette hausse aussi lev e. En effet, ce r mun ration plafond souhait e par Proxinvest nest plus d pass e en 2018 que par 22 pr sidents exclus du SBF 120 (don’t 16 du CAC 40) contre 29 en 2017 (don’t 19 du CAC 40).
Le patron de Dassault Systèmes reste en T te
De m me, la m diane des r mun rations (50% des grands patrons gagnent moins, 50% plus) au sein du CAC 40 baisse de 12% 4,1 millions d’euros, autre ment qui montre bien que l’inflation moyenne est le fait de quelques patrons seulement.
C’est le directeur g n ral de Dassault Systèmes (revenu en 2018 au sein du CAC 40) qui garde la te du classement. Bernard Charl s a per u une r mun ration total de 33,1 millions d’euros selon les calculs de Proxinvest, en hausse de 34,6%, gr ce « une tr s g n reuse attribution gratuite dactions de performance » don’t la valorisation a t retrait e par Proxinvest ( l’entreprise indique pour sa partie une run ration de 22,9 millions d’euros).
Le PDG de Kering, François-Henri Pinault, prend la deuxi me place. La prime exceptionnelle attribuée sous forme de performance sans condition de performance dune valeur de 5,81 millions d’euros, ainsi qu’une convention dassistance conclue avec sa holding Art mis dun montant de 5,08 millions, police grimper le co t total 17,3 millions d’euros (75,7%) au sens de Proxinvest (12,2 millions selon le groupe).
14,3 millions d’euros versez Carlos Ghosn
L’ex président-directeur général de Renault et ex-président de Nissan, démissionné début 2019, apparaît en troisième place avec 14,3 millions d’euros (+12,1%)… Alors même qu’il na perçu aucune rémunération variable au titre de lexercice 2018 de la part de Renault à la suite du rejet par lassemblée générale (sur recommandation du conseil) de la résolution afférente. Carlos Ghosn a aussi été privé dactions gratuites et de retraite. Chez Nissan, le coût communiqué au titre de lexercice clos le 31 mars 2019 (année fiscale décalée au Japon) sélève à 13,3 millions d’euros. Laffaire Ghosn aura permis de comprendre que Carlos Ghosn avait tous pouvoirs pour décider unilatéralement de sa rémunération chez Nissan, et mis au jour « un manque de transparence vis-à-vis des actionnaires et de capacité de contrôle sur les avantages indirects perçus par les parties liées ».
L’américain Douglas Pferdehirt, l’ancien dirigeant de FMC Technologies et actuellement PDG de TechnipFMC est selon Proxinvest le quatrième dirigeant le mieux payé, avec une rémunération totale qui sélève à 11,7 millions d’euros (+10,7% en 2018), malgré un bilan financier peu reluisant. La société, promise à une nouvelle scission, a affiché 1,7 milliard d’euros de pertes nettes, mais également une baisse de 16% de son chiffre daffaires, et une baisse de son cours de 61% depuis la fusion, sans parler d’un contexte social très dégradé. Douglas Pferdehirt sest néanmoins de nouveau vu attribuer des instruments de rémunération (options et actions gratuites) sans conditions de performance, « mauvaise pratique usuelle aux Etats-Unis mais non conforme au code Afep-Medef », rappelle la société de conseil.
Jean-Paul Agon, le PDG de LOr al, occupe la cinquième place du classement avec 9,5 millions d’euros, une r mun ration en l ger de recul -0,5%. N anmoins, le patron de l’or al b n ficie toujours de la r mun ration fixe (2,2 millions d’euros) et que la rente attendue de retraite (1,57 million d’euros) les plus élevés du CAC 40.
Guillaume Bayre – 2019 BFM Bourse