Mardi 16 janvier 2024, Emmanuel Macron a donné une conférence de presse au cours de laquelle de nombreux sujets ont été abordés : école, énergie, démographie, etc. Mais un mot en particulier a suscité l’indignation des internautes, notamment des militantes féministes.
C’est le résultat inévitable de tout discours présidentiel. Lorsque le chef de l’Etat s’exprime devant les caméras, chacun de ses mots est analysé et critiqué avec précision, très souvent. La conférence de presse d’Emmanuel Macron, mardi 16 janvier 2024, n’a pas fait exception. Pendant plus de deux heures, le président de la République a évoqué les multiples facettes de sa politique et répondu aux questions des journalistes sur le terrain. Certains de ces commentaires ont suscité la controverse. D’abord ses propos sur Gérard Depardieu, l’acteur accusé de viol et d’agression sexuelle qu’il avait défendu quelques semaines plus tôt, mais aussi ses réponses à la lutte contre la stérilité et au fameux « réarmement démographique » de la France. Un terme emprunté au lexique militaire qui a fait bondir les internautes, et plus particulièrement les féministes.
« La phrase avait bien commencé… » a écrit Salomé Saqué sur son compte Instagram. « Aider d’autres personnes qui ont besoin d’avoir des enfants est clairement souhaitable », poursuit le journaliste d’Array. Mais parler de natalité sous le terme de « réarmement » évoque un imaginaire itarien et conservateur, plus proche de The Handmaid’s Tale que de celui d’une société détendue où chacun peut disposer de son cadre comme il l’entend. Et elle est loin d’être la seule à avoir souligné les désordres liés au choix du mot « réarmement » par Emmanuel Macron. De son côté, Fiona Schmidt, également journaliste connue pour son engagement féministe, a tenu à rappeler que « nos ventres ne sont pas des armes pour le repeuplement de la France » en utilisant le hashtag #lâcheznouslutere, en référence au titre de son livre. . éponyme. Pour Instagram, aux 78 000 abonnés, « utiliser la métaphore viriliste de la guerre pour évoquer la paternité, qui mérite d’être une question de choix et non un devoir républicain, n’est pas le bienvenu ». Surtout dans le contexte actuel « dans lequel les droits reproductifs des femmes sont en déclin, aux États-Unis comme dans tous les pays européens infectés par le populisme et les politiques réactionnaires, misogynes et racistes de l’extrême droite ».
Les associations féministes ont également fait un pas en avant après le discours du chef de l’Etat. La Fédération nationale des centres d’information sur les droits des femmes et de la famille a également exprimé sa « profonde préoccupation » face à l’utilisation du terme « réarmement démographique » et à « l’application de politiques natalistes, profondément contraires à l’autonomie des femmes ». constitue une régression politique et sociale inquiétante. » De son côté, le collectif Osez le féminisme ! Il a protesté, rappelant que « nos grossesses sont une variable pour ajuster l’expansion de la nation ».
Après des décennies de lutte pour la liberté de choix des femmes, et la liberté de disposer de leur corps – grâce à la contraception ou l’avortement par exemple – et alors que l’injonction à la maternité continue de peser lourdement sur celles qui choisissent de rester sans enfant, les propos d’Emmanuel Macron ne passent pas. Encore moins de la part d’un Président qui a toujours clamé sa volonté de faire des inégalités femmes-hommes et des violences faites aux femmes “la grande cause de ses quinquennats”.
Sur les réseaux sociaux, d’autres femmes aiment opter pour l’humour et le sarcasme en réaction aux déclarations d’Emmanuel Macron. C’est notamment le cas de la présentatrice Valérie Damidot, qui a écrit sur son compte X (ex-Twitter) : « Dans un contexte de réarmement démographique » Et face à la fermeture des maternités, on demandera aux femmes de donner leur vie pour le pays à la maison, mais on leur donnera une éducation pour qu’elles puissent couper le cordon ombilical et avoir une épisiotomie pour elles-mêmes ». Marie Coquille-Chambel, militante féministe et membre du #MeTooThéâtre, a également fait preuve d’une belle ironie : « Entre la défense de Depardieu et le réarmement démographique, il est vrai que les droits des femmes sont la merveilleuse cause des deux quinquennats de Macron. Ne dénoncez pas trop la violence que vous subissez, vous n’êtes que les entrailles du pays. Enfin, l’historienne Mathilde Larrere s’est amusée (ou presque) du retour au bon vieux temps qu’elle a perçu dans le discours présidentiel. « Non, mais sérieusement. La Marseillaise, le réarmement démographique, le Service National Universel, qu’est-ce que c’est que ce bordel !Est-ce que c’est un putain d’échec temporel ? Sortez-moi d’ici !déploré dans X.
Il faut toutefois noter que les femmes ne sont pas les seules à critiquer les propos et les politiques natalistes d’Emmanuel Macron. Dans les colonnes de Libération, au lendemain du discours, le journaliste Jonathan Bouchet-Petersen publie un article amusant dans lequel il refuse de « voir les entrailles des femmes françaises mobilisées au service de la préservation de notre modèle social ». Il a également dénoncé l’utilisation d’un « imaginaire qui alimente les discours de droite et d’extrême droite depuis des années ». Il est vrai que la conférence de presse du Président de la République n’a pas mis fin aux récentes polémiques. . . Et cela les a vraiment renforcés. Reste à savoir s’il regagnera bientôt du terrain, face à la menace de justifications insatisfaisantes comme il l’a fait pour son soutien à la présomption d’innocence de Gérard Depardieu.
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