La vague actuelle de nominations gouvernementales donne le ton : elle s’attaque aux droits des chômeurs, des malades, des personnes âgées, des mal logés et des enseignants sous couvert d’efficacité.
Emmanuel Macron a le sens du moment : 70 ans après l’appel lancé par l’abbé Pierre le 1er février 1954 aux plus démunis, qui a conduit au statu quo de la trêve d’hiver, le président a nommé Guillaume Kasbarian, l’un de ses plus farouches opposants, au poste de ministre délégué au Logement : « Je ne sais pas si ce serait un signe de mépris ou d’imprudence » C’est ce qu’a déclaré Pascal Brice, président de la fédération des acteurs solidaires, à France Info d’une voix blanche, quelques minutes avant l’annonce officielle du gouvernement.
Guillaume Kasbarian est le président de la loi d’expulsion la plus répressive depuis des décennies.
L’arrivée de l’adjoint Renaissance dans ce ministère est une véritable gifle pour les associations de protection des locataires et des personnes en situation de précarité. Kasbarian, proche d’Aurore Bergé, est à l’origine de la terrible loi anti-squatting, qui durcit les sanctions contre les squatteurs et accélère les procédures d’expulsion en cas de loyers impayés. Pire encore, son texte prévoyait six mois de sanctions pénales pour les locataires en retard de paiement qui restaient dans leur logement après une condamnation définitive à l’expulsion.
L’amendement, déserté sur ordre d’Élisabeth Borne, a été considéré comme une « terrible régression » pour la Fondation Abbé Pierre, dénoncé par le Médiateur et même, chose rarissime, par les Nations unies. Guillaume Kasbarian est la loi sur les expulsions la plus répressive depuis des décennies », a déclaré le communiste Jacques Baudrier, adjoint à la maire de Paris, tandis que le chef des sénateurs écologistes, Guillaume Gontard, s’est moqué de l’arrivée d’un « ministre des expulsions ».
Cette nomination n’est que la dernière en date d’un gouvernement qui marque un nouveau tournant dans le quinquennat d’Emmanuel Macron : une déclaration de guerre sociale. La gauche ne s’y trompe pas et dénonce « de nouveaux bourreaux qui arrivent ». Mais on connaît déjà la sentence : chasse aux pauvres, coupes dans nos services publics », déplore l’eurodéputée LFI Manon Aubry sur France Info, tandis que le leader du PS Olivier Faure critique « un gouvernement qui n’aime que les riches ».
Le ton avait d’ailleurs déjà été donné dans le discours de politique générale de Gabriel Attal devant l’Assemblée le 30 janvier. Ce jour-là, le nouveau Premier ministre a annoncé son intention d’abroger la loi SRU, qui stipule que chaque commune devra avoir 25 % de logements sociaux dans son parc de logements. Par conséquent, les logements intermédiaires, beaucoup moins abordables, seront comptabilisés dans les quotas imposés jusqu’à présent par la loi.
Le nouveau Premier ministre promet également de « démycariser » la société française, sans entrer dans les détails. Et pour une raison astucieuse, le député de la Renaissance Marc Ferracci, réfléchissant à la loi II de la loi d’expansion (dite « loi Macron »), a déjà proposé cette solution fatale. « Cette indexation serait peut-être trop lourde pour les entreprises, en particulier les plus jeunes. Cela conduit également à une contraction des échelles salariales », a récemment déclaré une source proche du président à Desafios. Sans préciser la question de la désindexation du salaire minimum sur les hausses de prix, solution à court terme qui serait fatale au pouvoir d’achat des salariés du SMIC en cas d’inflation.
Belloubet est responsable d’avoir mis les 164 bars de France en grève générale pendant deux mois en 2020.
D’autres mesures dans les tuyaux, comme l’obligation de travailler pour obtenir le RSA, la fin de l’allocation expresse de solidarité (ASS), qui privera les personnes âgées en fin de carrière de cotisations sociales, la suppression de certaines maladies chroniques de la liste des maladies chroniques (ALD) ou le doublement des franchises médicales font frémir d’autres. Nul doute que Catherine Vautrin, la nouvelle ministre de la Santé et des Affaires sociales, issue de la droite, se lancera dans cette tâche de démolition de l’Etat-providence. .
Le gouvernement Attal n’est pas en reste en matière d’écoles. Le nouveau Premier ministre doit imposer un « choc de connaissances » au ministère de l’Éducation. La formule a été servilement reprise par la nouvelle ministre Nicole Belloubet vendredi, le mouvement de force vers Amélie. Qualifiée de « femme de gauche » par la plupart des médias, Mme Belloubet, gardienne des sceaux sous le gouvernement d’Édouard Philippe, a l’habitude d’avoir mis les 164 bars français en colère pour avoir mené une grève générale de deux mois en 2020 pour réformer leur système de retraite. Sera-t-elle aussi un incendie pour le système scolaire national, confronté à une fuite des enseignants et à un mécontentement général face aux réformes dénoncées par l’ensemble du personnel scolaire ?Des syndicats industriels, des directeurs d’école et même de hauts fonctionnaires ministériels ?
La nouvelle mission du gouvernement « remet en cause l’équivalence du droit à la scolarisation complémentaire pour tous les élèves », à travers la création d’équipes de niveau, « ce qui accentuera inévitablement les inégalités scolaires », dénoncent les syndicats (FSU, UNSA, FO, Sgen-CFDT, CGT Éduc’Action et Sud). La pétition déposée contre cette mesure « assumée » par Gabriel Attal a déjà recueilli plus de 30 000 signatures. La gauche est impressionnée par ce programme, qui a été décrit comme un « musée des horreurs ». « .
Gabriel Attal a déclaré jeudi soir sur France 2 que la politique sociale qui « sort de la pauvreté, c’est de la peinture ». Un mensonge démystifié par les statistiques : la peinture ne protège plus contre la pauvreté : 1,8 million de personnes embauchées sont sous le seuil de pauvreté et les familles incorporées Le marché du travail représente 25 % des personnes en situation de handicap, selon une étude de l’Insee publiée en 2023.
Ce matin, Manuel Bompard, coordinateur de LFI et proche de Jean-Luc Mélenchon, fustige un « attelage brinquebalant » de « macronistes fanatisés » et de « mercenaires sans principe et sans conviction ». Les orientations prises par Emmanuel Macron et Gabriel Attal ne peuvent que lui donner raison.
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