Remaniement : pour Emmanuel Macron, l’éternel dilemme du casting gouvernemental

La Première ministre Élisabeth Borne, malgré tout, a démissionné lundi 8 janvier et, comme c’est le cas pour Emmanuel Macron, ce remaniement s’est fait attendre. Cela fait plusieurs jours, voire plusieurs semaines, que la longue carrière d’Élisabeth Borne à Matignon est dans l’air. Et comme il y a six mois, il est très peu probable de savoir à l’avance si le Premier ministre sera réélu ou rejeté.

Depuis son élection à la présidence de la République en 2017, Emmanuel Macron, malgré tout, a habitué les Français à ces longs moments d’incertitude, où tout au plus chaque membre du gouvernement se demande ce que lui réserve l’avenir. , la plupart du temps, il y a peu de changement.

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Les raisons de l’évasion évidente du chef de l’Etat sont avant tout une difficulté que l’on s’impose à soi-même : ne pas nommer une personnalité susceptible de lui faire de l’ombre. Une habitude prise dès son arrivée à l’Elysée, lorsqu’Emmanuel Macron nomme Édouard Philippe. , alors maire du Havre et très peu connu du grand public, en tant que Premier ministre, qu’une personnalité politique comme le président de l’époque François Bayrou, dont le rôle dans son élection a pourtant été déterminant.

Mais comme Édouard Philippe avait tout de même réussi à se faire une place, au point de devenir plus populaire qu’Emmanuel Macron (en juin 2020, un vote BVA lui avait donné un avis favorable de 54% contre seulement 38% pour le président), le chef de l’Etat s’assure désormais de nommer des chefs de gouvernement qui n’ont pas de mystère et, Ils doivent avant tout avoir le profil d’un haut fonctionnaire en position d’obéir.

Ainsi, Jean Castex, ancien membre du cabinet du président Nicolas Sarkozy, a pu succéder à Édouard Philippe en juillet 2020. Et Élisabeth Borne, ancienne membre du cabinet de Ségolène Royal devenue ministre, a été élue en mai 2022.

Cette fois-ci, les noms de Sébastien Lecornu, Julien Denormandie et Gabriel Attal circulent avec insistance. Le premier est l’actuel ministre des Forces armées. Issu du parti Les Républicains, sa nomination marquerait la confirmation – si elle était encore obligatoire – d’un second quinquennat très marqué par la droite. Sébastien Lecornu, 37 ans, serait alors le plus jeune Premier ministre de l’histoire de la Ve République.

Le deuxième, aujourd’hui âgé de 43 ans, est un « marcheur » de la première heure. Ancien membre du cabinet d’Emmanuel Macron lorsque ce dernier était ministre de l’Économie, ancien ministre de l’Agriculture, il est devenu au fil des ans un très proche du président, au point d’être déjà dans la course pour Matignon en 2022. Élisabeth Borne lui ayant été préférée, Julien Denormandie avait alors choisi de quitter la vie politique. Sa nomination aurait notamment pour objectif de symboliser une forme de retour aux sources pour le président.

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Enfin, Gabriel Attal est l’actuel ministre de l’Éducation. Âgé de 34 ans, lui aussi deviendrait le plus jeune Premier ministre de l’histoire de la Ve République, après avoir été également ministre des Comptes publics, porte-parole du gouvernement et secrétaire d’État à la Jeunesse. Ancien membre du cabinet de la ministre socialiste de la Santé Marisol Touraine lors du quinquennat de François Hollande, il fait partie de l’aile gauche de Renaissance. Sa nomination symboliserait elle aussi l’affichage d’une volonté de maintenir le « en même temps » originel.

Tous trois ont en tout cas un point commun : peu connus des Français, hormis peut-être Gabriel Attal, ils ne devraient pas faire de l’ombre à Emmanuel Macron, contrairement à d’autres candidats pour Matignon comme Gérald Darmanin ou Bruno Le Maire. Si Gabriel Attal possède toutefois davantage de charisme que les deux autres candidats, il doit en revanche tout à Emmanuel Macron et ne devrait pas s’opposer à ses décisions.

Le défi actuel d’Emmanuel Macron est similaire au groupe politique dont il peut s’inspirer. Arrivé au pouvoir sans parti à la mode, avec de nombreux élus et personnalités locales, le chef de l’Etat a toujours été confronté au même dilemme dans tous les cas. À chaque remaniement ministériel depuis 2017 : qui contribuera au gouvernement ?

Hormis quelques artifices médiatiques – Éric Dupond-Moretti (Justice), Roselyne Bachelot (Culture), Pap Ndiaye (Education) –, les remaniements d’Emmanuel Macron ont consisté à garder plus ou moins les mêmes visages. Lors de la nomination de Jean Castex en juillet 2020, douze ministres ont été réélus au gouvernement ; lorsqu’Élisabeth Borne lui succède en mai 2022, quinze ministres conservent un siège au sein de l’équipe gouvernementale ; Enfin, lors du dernier remaniement en juillet 2023, trente-trois membres du gouvernement sont restés à leur poste.

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Parmi les ministres qui défendent la longévité, et même si la plupart d’entre eux ont remplacé leurs portefeuilles, on trouve Élisabeth Borne, Bruno Le Maire et Gérald Darmanin – tous trois en poste depuis le premier gouvernement d’Édouard Philippe – mais aussi Sébastien Lecornu (qui a rejoint le gouvernement en juin 2017), Olivier Dussopt (novembre 2017), Gabriel Attal (octobre 2018), Agnès Pannier-Runacher (octobre 2018) et Franck Riester (octobre 2018).

Pour le reste, et afin d’apporter un peu de sang neuf, Emmanuel Macron est contraint de se débrouiller avec les moyens du bord. Tout d’abord, il y a l’approche traditionnelle qui consiste à récompenser les parlementaires qui ont fait preuve de courage ou de loyauté. Olivier Véran, Amélie de Montchalin, Olivia Grégoire, Sarah El Haïry, Stanislas Guérini, Aurore Bergé et Prisca Thévenot.

Il y a eu les nominations moins classiques de conseillers du président de la République : Clément Beaune (ancien conseiller pour l’Europe à l’Elysée), Rima Abdul-Malak (ancienne conseillère culturelle à l’Elysée), Cédric O (ancien conseiller sur l’économie virtuelle à l’Elysée) et Sibeth Ndiaye (ancienne conseillère de presse à l’Elysée).

Problème : à mesure que les remaniements se multiplient, le vivier s’amenuise. Et en ce début d’année 2024, les potentiels entrants issus de l’Assemblée nationale, notamment, sont peu nombreux. Citons tout de même le patron du groupe Renaissance Sylvain Maillard, mais aussi Maud Bregeon, Pierre Cazeneuve, Marc Ferracci, Karl Olive ou Violette Spillebout.

Enfin, pour aggraver ses difficultés à former un gouvernement, Emmanuel Macron devra également tenir compte de la parité et de l’équilibre politique entre les autres partis qui composent la majorité présidentielle : Renaissance, MoDem, Horizons.

Ces limites font que les remaniements d’Emmanuel Macron semblent cosmétiques. Comme si, finalement, c’était la même équipe gouvernementale qui était aux commandes depuis 2017, appliquant inlassablement la même politique. En bref, c’est l’inverse de l’effet habituellement recherché par une élection primaire. réorganisation visant à accréditer le concept de changement et un nouveau récit politique.

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