Des étudiants ont empêché la conférence de François Hollande F.Launay/20 Minutes
« Répondre à la crise démocratique » : tel est le titre du livre que François Hollande devait présenter ce mardi après-midi à luniversité de Lille lors dune conférence avec des étudiants. Sauf que lancien président naura pas eu loccasion de sexprimer sur le sujet. La faute sans doute à la crise démocratique qui traverse le pays.
Car mardi à Lille, une centaine détudiants ont forcé lentrée de lamphi puis déchiré et balancé les livres de François Hollande avant même que lhomme politique narrive dans la salle. La conférence a évidemment été annulée, Hollande évacué (avant dentrer dans lamphi) et la scène restera dans les mémoires de la fac.
Des étudiants qui témoignent de leur précarité
Mais comment en est-on arrivé là ? Tout a commencé vendredi à Lyon où un étudiant, membre du syndicat Solidaires étudiant-e-s, sest immolé devant le CROUS pour protester contre la précarité étudiante. Brûlé à 90 %, il est toujours entre la vie et la mort. En signe de solidarité, plusieurs syndicats étudiants avaient appelé à manifester dans toute la France ce mardi. A Lille, ils étaient au moins deux cents à sêtre donné rendez-vous devant le CROUS.
Aux cris de « la précarité tue. Assassins » ou de tags comme « 450 euros, est-ce suffisant pour vivre ? », les étudiants présents ont témoigné de leurs difficultés à joindre les deux bouts à limage de Benjamin, étudiant en sciences politiques.
« Je dois avoir 200 euros pour vivre par mois », raconte un étudiant lillois
« Ça se traduit par compter tous les jours largent quon a pour manger, par un petit logement de 15 m2 chez un particulier. Comme je nhabite pas sur la métropole lilloise, je dois payer les transports en commun. Au final, je dois avoir 200 euros pour vivre par mois. Je comprends le geste de létudiant lyonnais car au bout dun moment, ça marrive aussi den avoir marre », explique le jeune homme de 21 ans. Comme lui, ils sont nombreux à témoigner de ce ras-le-bol.
François Launay (@francoislaunay) November 12, 2019
« Il a sa part de responsabilité dans la précarité des étudiants et on espère quil naura pas lindécence de venir sexprimer. Sil vient, on essaiera de se faire entendre car on fera en sorte que le geste de notre ami étudiant lyonnais ne soit pas un geste vain », annonçait Souane, militante au syndicat Solidaires quelques minutes avant larrivée de lex-président à la fac de Lille.
Un avertissement qui sera suivi deffets. Après avoir déjà tenté de bloquer la fac mardi matin, les contestataires ont réussi leur coup déclat. Entrés par une porte dérobée, les étudiants mobilisés sont parvenus à arriver jusquà lentrée de lamphi où Hollande devait intervenir. A force de pousser pendant plusieurs minutes sur les portes pour entrer, ils ont réussi par les faire céder.
François Launay (@francoislaunay) November 12, 2019
A peine à lintérieur, certains se sont précipités sur les livres pour les déchirer et les jeter dans lamphi sous les huées des étudiants venus assister à la conférence. Des scènes incroyables entre pro et anti blocage ont suivi. Slogans anti-capitalistes pour les uns, colère et tristesse pour les autres et une conséquence immédiate : lannulation de la conférence de François Hollande. Au grand dam du doyen de la faculté des sciences juridiques.
Des livres déchirés, des huées et une conférence annulée
« Je suis triste et dépité. Ça fait quatre mois quon travaille dessus. On prive nos étudiants de la faculté davoir une conférence de ce type-là. Il ma dit quil reviendrait mais je nen suis pas sûr. Cest limage de la fac qui en pâtit. La venue de François Hollande était loccasion de revenir sur ce qui sest passé vendredi à Lyon. Je suis allé voir les étudiants mardi matin pour leur proposer de poser une question sur le sujet à lancien président. Cétait convenu que lun dentre eux intervienne pendant la conférence. Au lieu de ça, ce sont des étudiants qui empêchent la tenue du débat », regrette Jean-Gabriel Contamin.
François Launay (@francoislaunay) November 12, 2019
Chez les étudiants, deux visions sopposent. Ceux qui justifient cette action malgré les livres déchirés qui en ont choqué plus dun. « On déchire des livres mais eux déchirent nos vies. Ça mémeut très peu. Voir un camarade qui simmole devant le Crous car il na que 450 euros pour vivre, ça me déchire plus le cur », explique lun des étudiants qui a participé à cette action. Pour dautres, le mode daction choisi nest pas le bon.
Une journée qui laissera des traces
« On est dans une démocratie. Tout le monde a le droit de sexprimer y compris un ancien chef dEtat. Ils ont le droit davoir leurs revendications mais ce nest pas une façon de faire. On ne déchire pas des livres, cest la base du savoir et de la transmission » assure Alizé, étudiante en sciences politiques.
François Launay (@francoislaunay) November 12, 2019
Opposés sur la forme et/ou sur le fond, étudiants, profs et dirigeants de la fac sont tous daccord sur le même point : cette journée particulière laissera des traces à luniversité de Lille où un ancien président de la République na pas pu sexprimer.