Crise politique en Bolivie. La sénatrice Añez présidente par intérim, Morales dénonce un « coup d?État » – Ouest-France

Le fauteuil présidentiel bolivien ne sera pas resté longtemps vacant. Mardi soir, Jeanine Añez, deuxième vice-présidente du Sénat, sest proclamée à la tête du pays malgré labsence de quorum au Parlement, arguant de «la nécessité de créer un climat de paix sociale» dans le pays secoué par une grave crise politique depuis lélection présidentielle fin octobre.

«Nous souhaitons convoquer des élections au plus vite», a ajouté la sénatrice de droite qui revendiquait la présidence par intérim face à la vacance du pouvoir provoquée par les démissions en cascade du président Evo Morales et de ses successeurs prévus par la Constitution: le vice-président, la présidente et le vice-président du Sénat ainsi que le président de la Chambre des députés.

Jeanine Añez sest immédiatement rendue au siège du gouvernement où elle a prêté serment, tandis que le Tribunal constitutionnel a validé cette élection. Elle sest ensuite réunie avec les chefs de larmée et de la police.

Evo Morales promet de poursuivre «la lutte»

Ce que na guère apprécié Evo Morales. «Le coup dÉtat le plus astucieux et le plus odieux de lhistoire a eu lieu», a aussitôt réagi sur Twitter lex-chef de lÉtat socialiste depuis le Mexique, où il sest exilé. Depuis Mexico, où il est arrivé dans laprès-midi en avion militaire après un périple rocambolesque de seize heures au gré des ordres et contrordres des pays latino-américains survolés, Evo Morales a promis de poursuivre «la lutte», affirmant quil ne cesserait pas de «faire de la politique».

«Tous les peuples ont le droit de se libérer», a dit celui qui a longtemps incarné un symbole démancipation pour les populations indigènes de son pays. Il a aussi remercié le Mexique de lui avoir «sauvé la vie». «Ça me fait mal dabandonner le pays pour des raisons politiques, mais [] je reviendrai bientôt avec plus de force et dénergie», avait tweeté lundi soir Evo Morales, qui a démissionné la veille après avoir été lâché par larmée.

Le chef de lÉtat, dont la réélection pour un quatrième mandat était considérée comme irrégulière par lopposition et les observateurs de lOrganisation des États américains (OEA), sétait retrouvé de plus en plus isolé, alors quune grève générale et les manifestations paralysaient lactivité du pays depuis une dizaine de jours.

Des élections avant le 22 janvier?

Jeanine Añez, une avocate de 52 ans, doit désormais nommer son gouvernement et convoquer de nouvelles élections dans un délai de 90 jours selon la Constitution. Elle a promis quelles auraient lieu avant le 22 janvier 2020.

«Je félicite la nouvelle présidente constitutionnelle de Bolivie Jeanine Añez», a réagi sur Twitter le candidat centriste Carlos Mesa, qui contestait les résultats de la présidentielle du 20 octobre et réclamait un second tour. Le leader de la contestation populaire, Luis Fernando Camacho, a également reconnu la sénatrice dopposition comme présidente par intérim et appelé à une «suspension des manifestations», notamment dans son fief de Santa Cruz (est).

À son arrivée au Parlement, où nont pas siégé les parlementaires majoritaires du Mouvement vers le socialisme (MAS), le parti dEvo Morales, Jeanine Añez avait déclaré à la presse: «Nous ne pouvons pas rester sans gouvernement».

La France appelle au calme et à la retenue

Lundi, après de violentes protestations, larmée avait été déployée dans les rues pour appuyer la police. Mardi, La Paz est restée paralysée, sans transports publics. Ce même jour, dans deux déclarations différentes, vingt pays membres de lOEA ont appelé à la fin de la violence et au respect de lordre constitutionnel pour surmonter la crise dans le pays, lors de la première réunion de lorganisation depuis la démission dEvo Morales.

Un de ses alliés, le président vénézuélien Nicolas Maduro, a demandé à larmée bolivienne de rétablir au pouvoir lex-chef de lÉtat, considérant que le pays courait un risque de «guerre civile». La France a, elle, appelé «au calme et à la retenue toutes les autorités de transition» tandis que Washington a conseillé aux citoyens américains de ne plus voyager en Bolivie pour cause de «troubles civils», et a limité sa présence diplomatique dans le pays.

Dimanche soir, des milliers de Boliviens avaient célébré dans les rues le départ dEvo Morales, après la vague de violences post-électorales au cours de laquelle sept personnes ont été tuées, selon un nouveau bilan annoncé mardi par le procureur général, et au moins 383 autres blessées.

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