Crise à l?hôpital : ce qu?il faut savoir sur la journée de grève de jeudi – Le Parisien

Un jeudi noir. C’est ce que promet la quinzaine d’organisations syndicales qui appellent les personnels de santé des établissements publics à faire grève et à manifester contre leurs conditions de travail et pour de nouveaux moyens ce 14 novembre, à Paris et en province. Du succès de cette journée dépend la réaction du gouvernement qui planche actuellement sur un grand plan hôpital, promis par Agnès Buzyn fin octobre et dont le détail pourrait être dévoilé la semaine prochaine. Un plan attendu aussi par le Sénat qui a suspendu mardi le vote du budget de la Sécu pour 2020.

Tous les ingrédients sont réunis pour marquer cette journée d’une pierre blanche. L’Elysée et Matignon redoutent même que ce mouvement des blouses blanches, lancé en mai dernier par les personnels non médicaux des urgences, et qui a fait tache d’huile à l’hôpital, ne s’agrège au mécontentement des Gilets jaunes.

Du coup, les établissements ont massivement déprogrammé la plupart des interventions chirurgicales non urgentes et réquisitionné de nombreux personnels pour assurer la continuité du service.

Selon Inter-Urgences, à l’initiative du mouvement, 268 services d’urgences sur 650 sont actuellement touchés par des grèves. Depuis l’été s’est constitué un autre collectif, Inter-Hôpitaux, qui appelle aussi à la grève pour des moyens et de meilleures conditions de travail et d’accueil des patients à tous les étages de l’hôpital.

Les syndicats d’internes, de jeunes médecins, de kinés, de psychologues s’associent au mouvement. Même les doyens des facultés de médecine soutiennent la journée, incitant leurs étudiants à descendre dans la rue.

À l’AP-HP, qui compte 37 hôpitaux en Île-de-France, 80 % des personnels paramédicaux (infirmières, aides-soignantes) devraient se déclarer grévistes, même réquisitionnés.

La colère a même gagné les discrets médecins chefs de service. Ils ont entamé une « grève du codage », qui permet aux établissements de facturer les actes à l’Assurance maladie. C’est le cas à Marseille et à l’AP-HP, où 380 services sont touchés par cette pratique qui pénalise les finances des 39 hôpitaux du groupe.

Le ministère de la Santé a pourtant annoncé en juillet un plan à 750 millions d’euros. Mais l’incendie, loin de s’éteindre s’est propagé à tout l’hôpital.

Car plus que les moyens, c’est l’attractivité de l’hôpital qui est en jeu. Sur les 230 postes de personnels paramédicaux proposés par l’AP-HP suite au plan urgence de Buzyn, seule une vingtaine a trouvé preneur.

« On a rarement vu une telle situation, réagit le directeur général adjoint de l’AP-HP, François Crémieux. On assumait la suppression cette année de 779 emplois administratifs ou techniques du fait de réorganisations, hausse de la chirurgie ambulatoire… Mais on va finalement avoir perdu 1300 postes. » Il manque des anesthésistes, gériatres et pas moins de 100 manipulateurs radio ! « Et pour les infirmières la situation s’est sévèrement dégradée, poursuit-il : nous en cherchons 500 ! »

Cette difficulté à recruter tient au prix élevé des loyers en région parisienne, aux horaires de nuit, aux temps de transport, aux salaires plus attractifs dans le privé.

Pour faire tourner la boutique, l’AP-HP a dû faire exploser le compteur des heures supplémentaires des paramédicaux : + 13 % en 2019 auxquels s’ajoutent 5,5 millions d’euros pour l’intérim.

Faute de personnels, la direction de l’AP-HP a été contrainte de fermer près de 800 lits cette année : 430 en médecine-chirurgie-obstétrique, 200 en soins de suite et réadaptation et 150 lits de longue durée. « Le personnel ne comprend pas ces fermetures, rapporte François Crémieux, mais nous n’avons tout simplement pas le choix. » On attend déjà la réponse du gouvernement.

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