Emmanuel Macron peut-il sauver son quinquennat en passant par la boîte de crise ?

Arnaud Benedetti est professeur associé à l’Université de la Sorbonne et au HEIP et rédacteur en chef de la Revue politique et parlementaire. Son livre le plus récent, « How Did Politicians Die?Le grand malaise du pouvoir », est aux Éditions du Cerf (4 novembre 2021).

Arnaud Benedetti : En réalité, il est très inopportun qu’il y ait une forme de résignation, sauf à céder au piège et au mal de notre temps, celui de l’immédiateté. À ce stade, nous n’aurons rien à préjuger, surtout à long terme. Evolution d’un mouvement social. Nous sommes entre parenthèses entre la fin de la discussion parlementaire, la première lecture, à l’Assemblée nationale, sa reprise au Sénat et la journée nationale d’action du 7 mars. Cette journée sera décisive : son ampleur dépendra de la poursuite de la rénovation. . . et peut-être le mandat de cinq ans. Une impasse à long terme avec l’aide de l’opinion publique remplacerait nettement la situation. Nous n’en sommes pas encore là, c’est un fait, cependant, l’hypothèse, si elle se réalisait, constituerait effectivement l’accès à une phase de merveilleuse incertitude, avec une crise sociale qui peut se transformer en crise politique, voire en crise de régime.

Mais si l’on garde sa question, à savoir l’option d’une bonne fortune de l’exécutif et d’un renoncement à l’opinion publique, malgré l’hostilité de cette dernière à la réforme, force est de constater que le président peut simplement se vanter d’avoir réussi. en ayant suivi un texte dont il fait l’un des emblèmes, bien qu’il en surestime la portée, de ce qu’il invoque comme son logiciel « réformiste ». la distance pour d’autres révoltes sociales mais surtout politiquement pour le Rassemblement national qui ne manquerait pas de capitaliser sur un horizon électoral cohérent sur ce qui sera vécu et perçu comme une autre expression de la brutalité de ce que Jérôme Sainte-Marie appelle le « bloc élite ».

Ce n’est pas lui qui décide de l’histoire, il ne peut être qu’un acteur relatif, même périphérique. Une lecture rétrospective des occasions. La crise des gilets jaunes a surtout vu l’expression de l’agitation quasi physique d’une force peu habituée à la violence inhérente à l’émergence de l’histoire. Le bloc élitiste dont il émane a exorcisé l’occasion en laissant passer le lest d’une part, notamment sur le plan budgétaire et en attestant d’autre part et sans réserve d’un mépris social décomplexé digne du parti de l’ordre du milieu du XIXe siècle. Ils ont compensé leur faiblesse politique par une exacerbation de leur élégance. Cela a été démontré, et bien qu’ils aient pu triompher de l’épreuve, notamment en raison de l’incapacité des gilets jaunes à rationaliser leur discours et à s’offrir une solution politique, ils ont trop parlé d’eux-mêmes pour échapper à la haine populaire qu’ils ont suscitée et continuent de générer.

Sauver les meubles politiquement ne signifie pas assurer une victoire à long terme. Ils ont perdu dans la mesure où ils n’ont pas contrôlé pour cacher leur fragilité intrinsèque et leur réflexe oligarchique, ce dépôt perceptif est un poison lent qui nourrit ressentiments et mobilisations. A cette défaite en termes de symbole s’est ajoutée une défaite idéologique dont l’acte a été consacré à travers la crise du fitness. Crazy Pognon » pour éviter l’effondrement général. Tout le reste, les circonvolutions sur la volonté de « reconstruire », les commentaires des pros de l’observation sur la capacité tactique de l’Elysée sont de la « littérature », l’interprétation prompte de l’immédiateté. Le macronisme a survécu et survit non pas parce que les occasions valident son corpus (au contraire elles l’invalident) mais parce qu’il est conditionné par la fracture de la boîte politique et des oppositions.

De plus, et c’est même là l’enjeu majeur, le mandat quinquennal que vous demandez est indissociable du législatif. Cela prendra-t-il fin? C’est le seul tableau valide. Pour une fois, Emmanuel Macron, qui aime dépasser le précipice – ce qui rend son personnage éminemment romantique – pourrait être tenté par une dissolution, le moment venu, de fabriquer un nouveau type de « passlem » partisan. C’est sa seule marge de manœuvre, elle n’est pas sans risques, mais elle ne peut être qu’un levier pour refabriquer quelque chose de nouveau ou de totalement transgressif, si l’on devait se retrouver dans une configuration inédite sous la Ve République avec une Assemblée à la majorité inaccessible. . . ou interdit.

La malédiction de la fin du moment est l’asthénie. Une fatigue à laquelle on n’échappe pas. Même de Gaulle devant lui, compris par un instinct sans précédent qui compromettait l’énergie nationale; Il a ainsi mis son mandat en jeu, par le biais d’un référendum qui l’a battu. Mitterrand aussi, avec Maastricht, mais les affaires, les luttes fratricides du PS, la maladie du prince ont également épuisé son mandat de sept ans qui s’est terminé par une coexistence. Chirac a tout brûlé lors de son premier mandat; installé le quinquennat et déséquilibré avec Jospin l’architecture constitutionnelle, puis inauguré les réélections en utilisant la diabolisation du populisme, dont Emmanuel Macron a industrialisé l’esprit à deux reprises en 2017 et 2022.

Macron est-il condamné à cette inévitabilité que tout terme d’un moment est celui de l’épuisement, le garçon date trop petit?Le président sait que rien de collectif dans les cinq premières années ne marquera l’histoire de la République, des occasions exogènes comme la crise des gilets jaunes. et la crise des aptitudes. Il investit donc dans cette réélection par défaut pour marquer les esprits. Le défi est que, structurellement, cette Assemblée est une contrainte durable et épaisse qui entrave l’action présidentielle. Capacités à refuser un horaire que vous possédez?Rien n’est moins sûr. Les textes à venir feront l’objet d’incertitudes ontologiques : immigration clairement et même pas communiquer sur la réforme constitutionnelle qui à ce stade, compte tenu de la composition du Congrès, est difficile à engager. La psychologie profonde d’Emguyuel Macron, ou ce qu’il semble savoir, suggère qu’il jettera un coup d’œil le moment venu, peut-être un de ces coups de poker qu’un type de force aussi ludique qu’il aime expérimenter.

Probablement le pari qu’il fait est le désordre, la radicalisation des oppositions, l’excès de la gauche rebelle et de ses chirurgiens, l’incapacité du RN à gagner en crédibilité et l’incapacité des républicains à se reconstruire comme une option charismatique et audible. Il est vrai que l’espace public est traversé par une telle inflammabilité qu’une crise sociale et politique peut servir en quelque sorte de stratégie pour mettre fin à la crise, en passant par la dissolution dans la première intention. De Gaulle l’a fait en 1968, mais Macron n’est pas De Gaulle. Gaulle et De Gaulle ont fini, malgré les élections législatives victorieuses, par perdre leur main. . .

Arnaud Benedetti est professeur associé à l’Université de la Sorbonne et au HEIP et rédacteur en chef de la Revue politique et parlementaire. Son livre le plus récent, « How Did Politicians Die?Le grand malaise du pouvoir », est aux Éditions du Cerf (4 novembre 2021).

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