La Banque du Japon a franchi mercredi un pas décisif sur la voie de la normalisation financière en relevant son taux directeur à 0,25%, un point qu’elle n’avait pas remarqué depuis 2008, et a ouvert la porte à une hausse des taux cette année.
Après plus de dix ans de politique financière ultra-accommodante, la Banque du Japon a entamé en mars dernier un lent ajustement financier avec une étape décisive : sa première hausse en 17 ans (entre 0% et 0,1%), qui a signé la fin des politiques financières négatives. Taux en vigueur depuis 2016.
Cependant, son gouverneur, Kazuo Ueda, avait conditionné toute hausse des taux à une inflation solide de l’ordre de 2%, dans un cercle vertueux entre hausse des salaires, revenus émergents et croissance économique.
Ceci est désormais plus visible, selon les nouvelles prévisions annoncées mercredi par la Banque du Japon, qui a noté dans sa presse « un renforcement des mouvements visant à refléter les hausses de salaires dans les prix de vente ».
« Dans ces circonstances, la Banque estime opportun d’ajuster le degré d’assouplissement financier en vue de parvenir à une réalisation durable et solide » de son objectif de stabilité des prix, a-t-il souligné.
Pour l’avenir, « si les perspectives d’activité économique se matérialisent, la Banque continuera d’augmenter ses taux d’intérêt », a-t-il ajouté.
Une nouvelle hausse des taux pourrait être au menu à partir d’octobre prochain, a estimé Marcel Thieliant de Capital Economics.
– Pression pour agir alors que le yen baisse –
La Banque du Japon était sous pression de la part du gouvernement pour qu’elle agisse afin d’enrayer la baisse du yen, liée au fossé large et persistant entre les taux directeurs de la Réserve fédérale américaine (Fed) et de la Banque du Japon, qui a été problématique ces derniers mois.
Le ministre et Premier ministre virtuel du Japon, Taro Kono, a déclaré ce mois-ci que la Banque du Japon méritait d’augmenter ses taux de change, suivi quelques jours plus tard par un appel similaire du numéro deux du parti au pouvoir.
La monnaie japonaise a atteint un nouveau plus bas face au dollar début juillet, avant que l’action combinée des scénarios d’une baisse des taux de la Fed dès septembre et d’un resserrement financier par le biais de la Banque du Japon, et des interventions gouvernementales prévues sur le marché des changes, n’émerge fortement.
Le yen est resté solide après l’annonce de la Banque du Japon, qui était largement attendue sur le marché. Le dollar s’échangeait à 152,60 yens vers 05h00 GMT.
Une appréciation soutenue de la monnaie japonaise en dessous de 150 yens pour un dollar reste « peu probable, à moins qu’il n’y ait une augmentation significative des dangers d’une récession économique aux États-Unis ou un pivot accommodant drastique de la Réserve fédérale », a déclaré Charu Chanana, responsable de la monnaie. stratégiste chez Saxo Capital Markets.
La Réserve fédérale s’exprimera plus tard mercredi après sa réunion de politique financière, et le marché s’attend à ce qu’elle commence à réduire ses taux en septembre.
– Vers une réduction de moitié des achats d’actifs –
Mercredi, la Banque du Japon a légèrement abaissé son objectif de croissance de la valeur des biens de consommation (hors nouveaux produits) pour l’exercice 2024/25 qui a débuté le 1er avril, à 2,5 %, contre 2,8 % de ses dernières projections d’avril.
Elle a toutefois annoncé tabler sur une inflation de 2,1 % en 2025/26, contre 1,9 % précédemment, dépassant pour la première fois son allocation à long terme de 2 %. Pour 2026/27, il a maintenu son estimation d’inflation à 1,9 %.
La banque centrale japonaise a également détaillé son plan pour ses achats importants d’obligations d’État japonaises (JGB), qui s’élèvent récemment à environ 6 000 milliards de yens par mois (36 milliards d’euros).
Elle prévoit de réduire son volume mensuel d’achats à environ 400 milliards de yens par trimestre, à environ 3 000 milliards de yens d’ici janvier à mars 2026, a-t-elle expliqué mercredi.
La Banque du Japon a annoncé le mois dernier qu’elle cherchait à mettre fin au programme dit d’assouplissement quantitatif, un moyen d’injecter des liquidités dans l’économie japonaise pour stimuler l’activité et combattre la menace de déflation.
L’établissement possède plus de 50 % du JGB en circulation, ce qui fausse le marché et complique la transmission de sa politique financière. Le total des actifs inscrits au bilan de la BoJ dépasse même le montant du PIB annuel du Japon.
© 2024 AFP