Nouvelles actions dans le calme à Paris et sur les ronds-points pour le premier anniversaire des « gilets jaunes » – Le Monde

Des « gilets jaunes » déjeunent sur un rond-point à La Ciotat (Bouches-du-Rhône, dimanche 17 novembre 2019. Daniel Cole / AP

De nouvelles actions de « gilets jaunes » ont lieu, dimanche 17 novembre, pour une nouvelle journée de commémoration du début de ce mouvement de contestation sociale inédit, après un samedi émaillé de heurts à Paris et dans plusieurs grandes villes et qui na pas su rassembler massivement.

Pour la journée de samedi, le ministère de lintérieur a recensé 28 000 manifestants en France, dont 4 700 à Paris. Le mouvement a, de son côté, estimé la participation à 39 530 personnes dans lHexagone, selon le décompte du « Nombre jaune ». Dimanche matin, le ministre de lintérieur, Christophe Castaner, a fait état de 254 interpellations dont 173 à Paris. Le parquet de Paris recensait, lui, 155 gardes à vue dont 8 concernent des individus mineurs.

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  • A Paris, occupation des Galeries Lafayette

Environ 200 personnes dont les figures « gilets jaunes » Jérôme Rodrigues ou Priscilla Ludosky , étaient rassemblées dans le calme dimanche sur une place à proximité des Halles, dans le cur de la capitale.

« Macron détruit la France et vos droits, ne nous critiquez pas ! On est là pour vous », pouvait-on lire sur une pancarte, ou entendre les chants habituels des « gilets jaunes » : « On est là, on est là, même si Macron le veut pas, nous on est là. »« Aujourdhui, on a organisé cette nouvelle journée parce que cest le week-end anniversaire. On espère récolter les fruits de ce quon a semé », a déclaré Faouzi Lellouche, un des organisateurs de ce rassemblement.

En début daprès-midi, plusieurs dizaines de « gilets jaunes » qui appelaient sur les réseaux sociaux à des actions de blocage dimanche dans des « temples de la consommation » ont occupé brièvement les Galeries Lafayette du boulevard Haussmann avant dêtre évacués par les services de sécurité. Ils se sont postés au niveau du troisième étage de la célèbre coupole du magasin doù ils ont lancé des confettis et entonné des chants, selon un journaliste de lAgence France-Presse (AFP).

? RemyBuisine (@Remy Buisine)

A la mi-journée, vingt personnes avaient été interpellées à Paris après 639 contrôles préventifs, selon la préfecture de police.

La Maison du peuple de la Flèche dOr a été vidée. La police est partie. Dedans, des vigiles, dehors, la foule dun https://t.co/uH0KEcAQ4L

? pibzedog (@Pierre Bouvier)

En fin daprès-midi, lancienne salle de concert La Flèche dor, dans le 20e arrondissement de Paris, a été évacuée. Dix-sept personnes ont été interpellées. La veille, des centaines de « gilets jaunes » avaient investi le lieu, fermé depuis trois ans, pour en faire une « maison des peuples ».

  • Hommage en Savoie à Chantal Mazet, morte il y a un an

Rassemblement en hommage à Chantal Mazet, un an après la mort de cette femme de 63 ans sur un rond-point du Pont-de-Beauvoisin (Isère), le 17 novembre 2019. ROMAIN LAFABREGUE / AFP

Plusieurs dizaines de personnes une soixantaine, selon lAFP ont rendu hommage dimanche matin au Pont-de-Beauvoisin (Savoie), à Chantal Mazet, « gilet jaune » morte il y a un an au premier jour des mobilisations après avoir été renversée par une voiture sur un rond-point de cette petite ville proche de Chambéry.

Les participants ont déposé de nombreuses bougies et des fleurs à lendroit du drame. « En mémoire à Chantal, citoyenne française tombée le 17 novembre, premier jour du mouvement des Gilets jaunes », pouvait-on lire sur une plaque commémorative, vissée depuis laccident à une grille bordant le rond-point. Une minute de silence a été observée par lassistance, invitée ensuite à une marche aux alentours du rond-point.

Le matin du 17 novembre 2018, Chantal Mazet, une retraitée de 63 ans, participait à une manifestation dune quarantaine de « gilets jaunes » au rond-point de la zone commerciale du Pont-de-Beauvoisin. Arrêtée par le barrage, la conductrice dun 4 × 4, qui dit avoir été prise de panique alors quelle devait emmener sa fille chez le médecin, avait accéléré et écrasé la victime en forçant le passage.

Mme Mazet a été la première victime tuée au cours des mobilisations des « gilets jaunes ». Dix autres personnes ont trouvé la mort, principalement dans des accidents de la route à proximité de barrages ou de ronds-points tenus par les manifestants.

Pour célébrer ce premier anniversaire, des « gilets jaunes » des Bouches-du-Rhône ont déjeuné dimanche midi à un rond-point de La Ciotat. Près dAubagne, des manifestants ont occupé le péage du Pont-de-lEtoile, avant dêtre expulsés par les forces de lordre.

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Au Mans, une dizaine de « gilets jaunes », qui tiennent depuis un an des « permanences daccueil » sur leur rond-point, ont dormi sur place dans la nuit de samedi à dimanche, assis sur des bancs ou des sièges de camping autour dun feu de bois, protégés par des bâches et avec pour unique pancarte : « Un an, rien na changé ».

« On était une cinquantaine hier après-midi. Aujourdhui, il ny a plus beaucoup de gilets jaunes sur les tableaux de bord, mais 80 % des automobilistes qui passent klaxonnent pour témoigner leur soutien », a raconté à lAFP Charles, 52 ans, ex-agrafeur dans une cartonnerie et aujourdhui sans emploi, un des « gilets jaunes » du rond-point « de M. Bricolage », comme ils se surnomment eux-mêmes.

« Cest la misère qui nous a réunis. On est happés par un système trop consumériste, on narrive plus à vivre, à manger, parfois à se chauffer », explique Charles, pour qui les 17 milliards deuros daides et de baisses dimpôts annoncés par le gouvernement nont « pas changé grand-chose ».

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  • Polémiques après les heurts de samedi

Interrogé sur Cnews/Europe1/LesEchos dimanche matin, le ministre de lintérieur, Christophe Castaner, a fustigé les « voyous » venus samedi « pour se battre, en découdre avec les forces de lordre, empêcher les pompiers dagir ». Il a estimé que « ceux qui restent aujourdhui sont des gens qui nont comme seul moteur que la colère, la haine et la volonté den découdre ».

« Le mouvement des gilets jaunes est, depuis un certain nombre de mois, gangrené par des ultras, des gens qui considèrent que la violence politique est légitime », a déclaré Sibeth Ndiaye, porte-parole du gouvernement, sur Radio J. Pour autant, « on ne peut pas résumer » le mouvement « exclusivement à ces violences », a-t-elle ajouté, parce qu« il a été porteur à la fois de ce quest le mal-être français » et de « revendications » auxquelles le gouvernement a, selon elle, apporté des réponses « extrêmement massives ».

De leur côté, des « gilets jaunes » ont dénoncé linterdiction de la manifestation qui devait partir samedi de la place dItalie, dans le 13e arrondissement parisien, comme « une décision politique » et « une stratégie de nous nasser » (encercler par les forces de lordre), comme la déclaré dimanche à lAFP Faouzi Lellouche, lun des organisateurs, lors du rassemblement près des Halles. « Ce nest pas normal quon ait autant de répression », a renchéri Priscillia Ludoski.

Dans un tweet, lhistorienne et chroniqueuse sur lémission Arrêt sur images, Mathilde Larrère, présente à la manifestation de samedi à Paris, a raconté avoir été empêchée de quitter la place dItalie malgré « un nuage de gaz » et « des détonations ». « Cette répression, ce refus de laisser sortir les gens tout en en laissant dautres entrer pour quils se retrouvent dans la souricière, ces gazages permanents, les grenades qui pètent de partout, cest indigne dun Etat démocratique », a-t-elle écrit.

De son côté, le maire du 13e arrondissement, Jérôme Coumet (DVG), a regretté que la préfecture ait autorisé initialement ce rassemblement sur la place dItalie alors quil lavait alertée sur le fait que celle-ci était en « totale rénovation », avec « trois chantiers importants ». « Nous avions sécurisé comme nous le pouvions lensemble de ces chantiers, mais ça a servi de projectiles évidemment. Ça ma hérissé », a-t-il déploré au micro de Franceinfo.

Après avoir rappelé que 600 policiers et gendarmes avaient été blessés en 2018, Stanislas Gaudon, secrétaire général adjoint du syndicat de police Alliance, a, lui, estimé sur BFMTV quon ne « condamn[ait] pas assez fermement ceux qui commettent des exactions à lencontre » des forces de lordre.

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