L’économie française est-elle « à la tête d’une crise grecque avec une force de dix » ?

Comme prévu, la crise politique dans laquelle la France est entrée depuis le 9 juin et la dissolution de l’Assemblée nationale s’aggrave de jour en jour. Non seulement, selon les sondages, c’est une majorité absolue qui n’a pas été obtenue au lendemain du second tour des élections législatives, mais la société française semble de plus en plus divisée. En d’autres termes, la France risque de devenir ingouvernable et donc vouée à la stagnation dans le cas le plus productif et aux émeutes dans le pire des cas.

Cette impasse historique aura évidemment des conséquences négatives pour l’économie française, pour les investissements des entreprises, pour la consommation des ménages, mais aussi pour notre épargne. Car ne nous y trompons pas : la France est en danger aujourd’hui et l’est comme le sort de la Grèce sur la période 2010-2015. Cependant, tout en continuant à semer la panique dans la foule, il convient de noter que pendant cette crise regrettable, le PIB grec réel (c’est-à-dire corrigé de l’inflation) a chuté de 30,4%. Et, pour avoir une mesure complète de l’étendue des dégâts, il convient de noter qu’au premier trimestre 2024, ce même véritable PIB grec est encore inférieur de 22 % à son niveau de 2008 !

Evidemment, certains jugeront forcément la comparaison excessive. Et c’est là que réside le défi. Parce que, nous croyant intouchables et imprenables, nous, ou les dirigeants de notre « douce France », avons refusé de la moderniser et de mettre en œuvre les réformes indispensables. Loin de cette attitude courageuse, ils se sont plu à augmenter les dépenses publiques, les impôts et, bien sûr, la dette publique, qui continue de battre de vieux records, dépassant 3,1 billions d’euros d’ici la fin de 2023 et, en fait, 3,15 billions d’euros. euros au premier trimestre 2024.

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Certes, de 2017 à 2021, cette mauvaise gestion des dépenses et de la dette a été masquée par l’« impression monétaire » gonflée de la BCE, qui a acheté notre dette et celle des autres pays de la zone euro plus que nécessaire, les taux d’intérêt étant désormais artificiellement bas pour les gouvernements. captivité. Cependant, cette grande quantité de « monnaie magique » avait peu d’avantages et, surtout, elle alimentait l’inflation, obligeant les banques centrales à empêcher sa « fuite précipitée ». Autrement dit, à partir de 2022, le moment est venu de réagir et de payer les factures. Ainsi, avant même la crise politique qui frappe la France, la dette publique stratosphérique et la hausse de l’inflation ont provoqué une forte hausse des taux d’intérêt sur les obligations d’État, affaiblissant l’activité économique et provoquant une augmentation de la charge d’intérêt de la dette publique. qui dépassera bientôt les 75 milliards d’euros annuels.

Alors bien sûr, la France, c’est la Grèce. Elle possède davantage d’actifs et une économie plus importante. Cependant, dans la mesure où plus de 52 % de sa dette publique est détenue par des non-résidents, elle subira inévitablement de plein fouet les sanctions des investisseurs en cas de crise politique grave. Cela entraînera de nouvelles augmentations des taux d’intérêt des obligations d’État et donc des taux d’intérêt des prêts que les ménages et les entreprises doivent payer. Cela entraînera inévitablement une récession et une hausse du chômage.

Alors le spectre de la faillite de l’État français réapparaîtra. Pour s’en apercevoir, il suffit d’avoir le courage d’ouvrir les yeux sur l’actif net de ce dernier. Cette perception est simple : il s’agit des actifs de l’État public français dont la dette est soustraite. Et le verdict est malheureusement sans appel : la dette publique française avec le « hors bilan » (c’est-à-dire les engagements monétaires à long terme de l’État français qui n’ont pas encore été comptabilisés, par exemple le paiement des retraites des fonctionnaires) est d’environ 6 500 millions d’euros, alors que le prix des actifs de l’ensemble des administrations publiques avoisine les 4 500 millions d’euros. En d’autres termes, même si elles vendaient tous leurs actifs, les administrations publiques ne seraient pas en mesure de payer leur dette.

Bien sûr, malgré cette réalité cinglante, il est encore imaginable de souligner que le principal atout de l’État français n’est pas mesurable, car il est sa capacité à lever des impôts. Il est vrai que la France peut encore compter sur des recettes fiscales importantes, notamment liées au fonctionnement de ses sociétés et à la richesse vraiment importante du patrimoine des citoyens français. Ces deux « vaches à lait » permettent donc à l’État de faire appel encore et encore, au moins jusqu’à ce qu’il soit épuisé, ce qui est très susceptible d’arriver. en quelques trimestres, voire quelques mois. Surtout si les dirigeants français à long terme commettent la folie d’augmenter encore les impôts et/ou les tâches.

C’est triste à dire, mais en France les gouvernements changent, mais malheureusement les erreurs restent les mêmes. Ainsi, depuis plus de 40 ans, les dirigeants politiques français tentent de résoudre les désordres économiques et monétaires de la France par la même mesure : augmenter les impôts. A chaque fois, le même refrain revient : on crée un impôt, parfois présenté comme temporaire, pour combler un vide, mais le « temporaire » devient « permanent » et de nouvelles violations apparaissent.

Et c’est ce qui est inacceptable : parce que l’accumulation d’une charge fiscale qui est déjà la plus élevée au monde ralentira automatiquement la croissance. Pire encore, il y a un risque d’inciter certaines personnes morales et physiques à franchir le pas de l’offshoring. Manque de patriotisme », diront certains. Mais dans un monde ouvert, nous ne pouvons pas nous cacher la face en pensant qu’une aggravation et une complexification permanentes des impôts au cours des 40 prochaines années seront acceptées sans se plaindre.

Particularité de l’adage traditionnellement vérifié selon lequel « trop d’impôts tuent les impôts », il est évident qu’une nouvelle augmentation des impôts en France réduira l’assiette fiscale, ce qui équivaudra à prendre davantage, mais en tarte. plus faible, ce qui entraîne une baisse des revenus de l’État. Résultat, cela finira par creuser le déficit public, et la dette, puis les taux d’intérêt, ce qui ne fera qu’affaiblir à nouveau l’activité économique, aggravant encore le chômage et le déficit. . . et le cycle pernicieux continuera.

Cette succession de raisons et d’effets n’a rien à voir avec la politique, mais elle n’a tout simplement pas de sens inhabituel. Cela montre à quel point il est sérieux d’écouter les docteurs en économie français qui, ces derniers temps, protègent de nouvelles augmentations d’impôts, ignorant la logique et le bon sens. tout, puisque, face à ce désastre fiscal et économique, la négativité du patrimoine net de l’État français sera forcément mise en avant. Cette dernière perdra encore plus de crédibilité et verra les taux d’intérêt de ses prêts monter en flèche, ce qui n’empêchera pas un frein supplémentaire à l’investissement, à l’expansion et à l’emploi. C’est à ce moment-là que l’éventuelle faillite de l’État français provoquera celle de la France tout entière et qu’une crise financière, économique et sociale « à la grecque », bien que force de dix, sera inévitable, entraînant l’ensemble de la zone euro dans une crise existentielle irréversible. Bonne chance!

Marc Touati, économiste, président du cabinet ACDEFI, parmi les 8 vendeurs économiques les plus productifs, ajoutant RESET II – Bienvenue dans l’après mondial, publié en septembre 2022.

Vous pouvez également visionner ses chroniques vidéo sur sa chaîne YouTube, qui compte plus de 159 500 abonnés, en ajoutant la dernière en date : « La France au bord du chaos : de quoi s’inquiéter et que faire ? ».

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