« En dehors de la Terre » de Jean-Paul Kauffmann: la métaphysique de l’histoire.

« De La Terre » de Jean-Paul Kauffmann

L’équateur Éditions – 321 pages

 

Lors d’un dîner du dimanche soir, en 1997, Jean-Paul Kauffmann propose à sa famille d’aller à Eylau pour célébrer le bicentenaire de la bataille, le 8 février 2007, sans susciter le moindre enthousiasme ! Pourtant « la famille Fenouillard » se retrouve bien à Kaliningrad, au « pays des ex-soviets ». Ils vont arpenter les lieux désolés de cette Outre-terre en minibus jaune, à la recherche des traces de la victoire napoléonienne au goût amer, qui annonce les désastres futurs. Le récit des différentes séquences de cette journée si meurtrière reprend les mémoires historiques, en s’appuyant aussi sur le célèbre tableau de Gros, sur le Cimetière d’Eylau de Victor Hugo, sur le Colonel Chabert, la nouvelle de Balzac et le film d’Yves Angelo. Le narrateur alterne habilement les actes héroïques de la Grande Armée, qui atteignent leur apogée à travers la charge éblouissante de Murat, avec leurs propres découvertes dans cette ville improbable et les échos intimes qu’il retire de ce deuxième voyage à Eylau.

 

• Un titre magnifique et symbolique, Outre-Terre: Eylau est  une bataille d’au-delà, elle outrepasse toutes les autres dans son déroulement, son statut, sa signification.

• La quête d’un lieu intact, comme les îles Kerguelen, Sainte-Hélène ou Eylau : il éprouve une vraie jouissance devant ces lieux désolés. Il se définit comme un « chasseur de traces ».

• Il évoque avec pudeur ses trois ans d’emprisonnement au Liban, en refusant d’être réduit à ce passé d’ex-otage, tout en reconnaissant qu’il a profondément changé.

• Le thème du revenant : il s’identifie à Chabert, le mort-vivant, le fantôme qui réapparaît, alors que personne ne l’attend ; un « personnage fétiche dans notre famille. Un modèle d’endurance. On lui attribue  un pouvoir magique et bénéfique … héros lazaréen qui surgit d’entre les morts, avec ce  mélange de fierté et de dérision qui fait son charme. »

• Les différences et les rapprochements qu’il établit entre le travail du journaliste et celui du romancier : écrire l’a sauvé, comme les livres, qui lui permettaient d’échapper à la morosité de la pension.

• Des portraits éblouissants et particulièrement vivants des héros de cette bataille : Augereau, Marbot, Hautpoul, Davout et bien sûr Murat.

 

 

 

 

Tribune publiée le 23 avril 2016.

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